Cancer de la prostate métastatique : L’espoir d’une nouvelle prise en charge ?

Actualités sur la Prostate

Rédigé par Deborah L. et publié le 27 juin 2021

L’édition 2021 du congrès de l’American Society of Clinical Oncology (ASCO) a été l’occasion de communiquer sur les premiers résultats d’un essai clinique relatif au traitement du cancer de la prostate. Pour les cancer de la prostate métastatique , combiner d’emblée une hormonothérapie de nouvelle génération à une hormonothérapie classique et une chimiothérapie ferait gagner deux ans et demi de survie sans progression de la maladie. Zoom sur ces résultats prometteurs.

Cancer de la prostate métastatique

Prise en charge du cancer de la prostate métastatique

Cancer le plus répandu chez les hommes de plus de 50 ans, le cancer de la prostate est à l’origine de 9 000 décès par an en France. Parmi les 50 000 nouveaux cas diagnostiqués chaque année, environ 10% se révèlent d’emblée métastatiques, ce qui signifie que le pronostic de survie à long terme n’est pas élevé.

La prise en charge de ces tumeurs hormono-sensibles plus agressives s’est longtemps appuyée uniquement sur l’inhibition de la production de testostérone. Dès lors, le standard de prise en charge de ces cancers métastatiques hormono-sensibles (qui repose sur des médicaments d’hormonothérapie classique) a constitué pendant des décennies l’unique option thérapeutique. Mais de manière générale, ces médicaments n’ont permis aux patients de gagner qu’un an de survie sans progression de la maladie.

C’est en 2015 que l’arsenal thérapeutique s’est renforcé avec deux nouvelles stratégies permettant d’améliorer l’efficacité des traitements :

  • Associer d’emblée une chimiothérapie (à base de taxane) à un anti-androgène classique pour augmenter de 2 ans environ la durée médiane de survie sans progression de la maladie.
  • Utiliser des anti-androgènes de nouvelle génération (abiratérone, apalumide ou enzalutamide) qui améliorent les résultats de l’hormonothérapie traditionnelle.

À savoir ! Ces deux options stratégiques représentent le standard de prise en charge recommandé. C’est à l’oncologue que revient le choix de l’une ou l’autre de ces options  pour traiter son patient.

Certes, les progrès dans les traitements ont permis d’améliorer visiblement la survie des patients ces dernières années mais les avancées de la recherche en termes thérapeutiques demeurent cruciales. Les scientifiques se heurtent en effet à un manque de données quant au bénéfice qu’il existerait à cumuler d’emblée les différents traitements et pour quelle durée.

Dans ce contexte, les premiers résultats d’une étude européenne intitulée  PEACE 1 pourraient apporter un nouvel éclairage quant à l’amélioration de la prise en charge des cancers de la prostate métastatiques.

Une étude porteuse d’espoir

En menant cet essai clinique, les chercheurs avaient pour objectif de comparer le bénéfice d’une combinaison de 3 médicaments sur deux critères principaux : la survie sans progression de la maladie et la survie globale.

À savoir ! L’amélioration de la survie globale est le critère privilégié pour démontrer le bénéfice d’un médicament anticancéreux. La survie sans progression est considérée comme un critère de substitution de la survie globale. Elle s’applique aux situations métastatiques et mesure le temps durant lequel il n’y a pas de manifestation clinique d’une progression tumorale.

Pour mener à bien leurs recherches, les scientifiques ont suivi pendant 5 ans (de 2013 à 2018), une cohorte de 1173 patients :

  • Age médian 67 ans
  • Recrutés dans 80 hôpitaux de sept pays européens (France, Espagne, Italie, Suisse, Irlande, Belgique et Roumanie).
  • Avec un cancer de la prostate métastatique récemment diagnostiqué mais pouvant, à l’inclusion, avoir déjà démarré un traitement d’hormonothérapie conventionnelle (depuis moins de trois mois).

Ces patients ont ensuite été répartis de façon aléatoire en deux groupes :

  • Un groupe contrôle : traité par l’association de 2 thérapies : hormonothérapie classique + chimiothérapie.
  • Un groupe test recevant un traitement combinant 3 thérapies : hormonothérapie classique + chimiothérapie + hormonothérapie de nouvelle génération (1000 mg d’abiratérone/jour).

Après 42 mois, les  chercheurs ont alors pu observer les résultats préliminaires suivants sur la survie sans progression de la maladie :

  • Groupe contrôle : survie sans progression médiane de 2 ans.
  • Groupe test : amélioration très nette de la survie sans progression radiologique, quel que soit le nombre de métastases au diagnostic, avec un différentiel de deux ans et demi par rapport au groupe contrôle.

Ces premiers résultats plaident donc nettement en faveur de l’association simultanée  des 3 thérapies d’emblée. D’autant qu’à 6 mois,  la combinaison des 3 traitements n’a pas induit de toxicité additionnelle notable.

Vers une nouvelle prise en charge thérapeutique ?

Le professeur Karim Fizazi, oncologue et investigateur principal de l’étude PEACE 1 se réjouit de ces premières conclusions : «Gagner deux ans et demi supplémentaires, sans symptômes ni élévation des biomarqueurs de la maladie et permettre ainsi une durée de survie sans progression de 4 ans et demi, c’est du jamais vu ! ».

Ces résultats encourageants pourraient-ils conduire à la recommandation d’un nouveau standard de traitement des cancers de la prostate métastatiques ?  Pour le Pr Fizazi, tout dépendra  de l’évaluation du bénéfice de cette triple association thérapeutique sur la survie globale.

Les résultats de PEACE 1 sur ce deuxième critère d’évaluation principal sont attendus pour la rentrée. Mais le professeur a bon espoir que les résultats de cette étude seront suffisamment solides pour songer à une nouvelle stratégie de prise en charge des formes métastatiques du cancer de la prostate. 

Déborah L., Docteur en Pharmacie

Sources
– Cancer de la prostate métastatique au diagnostic. unicancer.fr. Consulté le 15 juin 2021.
– Comprendre le cancer de la prostate. ameli.fr. Consulté le 15 juin 2021.