Cancer de la prostate : chirurgie ou surveillance, le verdict après 29 ans de suivi ?

Actualités sur la Prostate

Rédigé par Estelle B. et publié le 26 mars 2019

Le cancer de la prostate est le cancer le plus fréquent chez l’homme, avec plus de 70 000 cas recensés chaque année en France. Dans les formes localisées de tumeur prostatique, peut se poser la question d’une prise en charge d’emblée chirurgicale (prostatectomie) ou d’une surveillance médicale rapprochée. Pour trancher, des chercheurs ont suivi sur près de 30 ans des patients atteints d’un cancer de la prostate et publient régulièrement le devenir de ces patients.

prostatectomie-surveillance

Prostatectomie vs surveillance médicale

L’essai clinique multicentrique SPCG-4 (Scandinavian Prostate Cancer Group Study Number 4) a été initié en 1989 sur 695 hommes, atteints de cancer de la prostate localisé, âgés de moins de 75 ans et dont l’espérance de vie estimée était supérieure à 10 ans. Les patients ont été aléatoirement répartis en deux groupes :

  • Un groupe de 348 patients a bénéficié d’une surveillance médicale adaptée et rapprochée ;
  • Un groupe de 347 patients a une prostatectomie radicale (ablation chirurgicale de l’ensemble de la prostate).

La première phase de l’étude s’est arrêtée en 1999, mais depuis, les chercheurs continuent de suivre les patients. Ils peuvent ainsi avoir du recul sur l’effet de la prise en charge du cancer sur le pronostic à long terme des patients.

Moins de mortalité et une meilleure espérance de vie

Début 2019, les derniers résultats du suivi des patients de l’étude ont été publiés. Ils révèlent que 80 % des patients sont décédés après une durée moyenne de suivi de 23,6 ans. Sur l’ensemble des décès, 32 % étaient liés au cancer de la prostate. Dans le groupe de patients traités par chirurgie, l’incidence cumulée des décès était de 71,9 %, contre 83,8 % dans le groupe des patients ayant été uniquement suivis. Le pourcentage de décès liés à un cancer métastatique était de 31,3 % dans le groupe traité par chirurgie, contre 43,3 % dans le groupe traité par un suivi médical.

Ainsi, la prostatectomie radicale des formes localisées de cancer prostatique avait permis aux patients de gagner en moyenne 2,9 années de vie supplémentaires. Ce bénéfice du traitement chirurgical s’est avéré plus important chez les hommes de moins de 65 ans, par rapport aux hommes de plus de 65 ans.

Enfin, l’extension de la tumeur en dehors de la prostate, ou un score de Gleason élevé (score pronostic très utilisé dans l’évaluation du cancer de la prostate), étaient associés à une multiplication du risque relatif de décès par cancer de la prostate. À nouveau, cette augmentation du risque était beaucoup plus marquée chez les patients ayant bénéficié d’un suivi médical, par rapport à ceux qui avaient été opérés.

L’intérêt de la chirurgie prostatique

Ces dernières données publiées montrent que la prostatectomie apporte un réel bénéfice pour les patients atteints d’un cancer localisé de la prostate. Ce bénéfice concerne plusieurs aspects :

  • Une baisse de la mortalité :
    • Toutes causes confondues ;
    • Liée au cancer de la prostate ;
    • Liée à un cancer métastatique ;
  • Une augmentation de l’espérance de vie moyenne.

L’étude SPCG-4, initiée avant l’avènement du dosage du marqueur PSA (Prostatic Specific Antigen), confirme l’intérêt d’utiliser les critères cliniques diagnostiques, plutôt que le dosage du PSA, pour établir la stratégie thérapeutique. Après plus de 29 ans de suivi, cette étude montre l’intérêt de la prostatectomie, dès qu’elle est indiquée, pour améliorer le pronostic du patient.

Estelle B., Docteur en Pharmacie

– Radical Prostatectomy or Watchful Waiting in Early Prostate Cancer – 29-Year Follow-up. Bill-Axelson, A. and al. 2018. N. Engl. J. Med. 379(24):2319-2329. doi: 10.1056/NEJMoa1807801. Consulté le 25 mars 2019.